samedi 31 octobre 2009

retour d'angoisse

Rien depuis le 1er août, je me fais rare...j'affronte d'autres soucis.
Entendre, c'est aussi ouvrir les yeux en même temps que les oreilles. Et j'ai vu que depuis 20 ans, petit à petit, l'emprise de mon conjoint se faisait de plus en plus étouffante, porteuse de mort affective, destructrice d'estime de soi.
Me voilà embringuée dans un divorce difficile, handicapée maltraitée, femme bafouée, mère méprisée.
C'est si facile la manipulation psychologique quand on s'attaque à un(e) handicapée.
Je ne me suis pas aperçue que pour m'appeler "on" me disait "hé" ou "on" me sifflait. Moi, j'entends un son, je réagis, sans connaitre la nature du son, en toute confiance, en toute naïveté. Et je suis si prévisible, toute mue par des principes que je me fais un honneur d'honorer. Je suis si persuadée que tout le monde œuvre dans l'intérêt de tous et de chacun. Je découvre les méchants, les envieux, les orgueilleux, les manipulateurs, les voleurs d'énergie, les imposteurs.
Et par dessus le marché, comme si cette prise de conscience et ces soucis n'étaient pas suffisants, me voilà de nouveau confrontée au salmigondis de mes collègues, à leurs jalousies, à leurs limites.
La décision du comité médical est enfin tombée : mi-temps thérapeutique accordé. Une victoire, une ouverture sur mon retour feutré en classe.
Seulement, cette décision ne fait pas l'unanimité. Je ne suis pas la bienvenue et on ne s'est pas privé de me le dire. On m'avait déjà rayée des listes. Pire, on n'avait même pas prévenu les parents de mon existence. Et tout le problème de mon retour s'est concentré sur la grande question : comment l'annoncer aux parents? Pourtant, je n'avais jamais caché que j'étais susceptible de revenir, que le comité médical était maitre à bord, et que si, de mon côté, j'œuvrais pour une reconversion, il s'agissait de démarches longues, difficiles, aléatoires.
Si on s'est inquiété de ma capacité à revenir  en classe, c'est pour déplorer la disparition possible de ma remplaçante, si bien, et à laquelle les enfants et leurs parents étaient habitués, et qu'on ne pourra pas récupérer si il s'avère que je ne tiens pas le coup, parce que, évidemment, je ne tiendrai pas le coup, simplement parce qu'elle aura été affectée sur un autre poste.
Pas un mot sur moi, personne humaine, mais des ressentiments exprimés vis à vis de l'administration qui ne sait pas ce qui se passe sur le terrain, qui s'en fiche même. D'ailleurs, le comité médical....il a pris sa décision comment? On t'a vue? Non, évidemment, on a décidé sur dossier, pourtant...
Pas difficile d'imaginer une suite à ce "pourtant", c'est même pensé si fort que la sourde que je suis toujours, même implantée, l'a entendue. Pourtant, on se rend bien compte, quand on t'a devant soi, que tu n'entends pas grand chose.
Quand j'en ai eu (enfin) assez de ce discours à sens unique qui faisait fi de ma personne et de mes sentiments, j'ai dit calmement, qu'il était temps de raisonner en adulte, que rien ne justifiait que l'on s'adresse à moi de cette manière, que je n'étais ni un enfant, ni une débile mentale (pardon, les enfants, pardon les débiles : c'est toute une façon de penser qu'il faudrait réformer), qu'il était temps de convenir des modalités de mon retour. Que ma remplaçante retrouve son poste inconfortable, certainement mais aussi formateur, de remplaçante itinérante, n'était pas mon problème. Au lieu de déplorer le verre à moitié vide, pourquoi ne pas regarder le verre à moitié plein... Elle aura pu gérer ma classe, depuis plus d'un an, dans des conditions optimum. On n'exerce pas pendant plus de 10 ans au même endroit, et en fin de carrière, sans créer les conditions de travail les mieux adaptées possibles. J'ai consacré mon dernier jour de travail à installer des paniers métalliques en haut du panneau de peinture afin d'y mettre les flacons de gouaches et ainsi, de dégager le sol de bacs encombrants. Et j'ai continué, chez moi, à coudre les coussins et les housses matelassées que je destinais au coin bibliothèque, et que je suis revenue installer un mercredi, en catimini, afin de ne pas la déranger.
J'ai un souvenir trop désagréable de mes premières années d'exercice, quand, remplaçante, je voyais, parfois, débarquer inopinément, l'enseignant titulaire qui se comportait alors dans sa classe comme si j'étais un accessoire importun qu'il convenait de remettre à sa place.
Alors, je me suis faite la plus discrète possible, tout en livrant les modes d'emploi que je croyais nécessaires mais qui ne répondait, en fait, qu'à mes nécessités. Ensuite, ma remplaçante a vécu sa vie d'enseignante comme elle a voulu, changeant la géographie de l'espace, le mobilier même, décrochant des panneaux ou les modifiant. Elle s'est, comme on dit, approprié l'outil de travail tout en promettant de tout remettre en place quand je reviendrai. Et c'est bien ce qu'il convenait qu'elle fît. Sa situation était précaire, toute subordonnée à la mienne, et elle devait redouter, ayant appris à aimer ce qu'elle avait créé et mis en place, de devoir tout abandonner pour retrouver les nominations au gré des congés de maladie. Mais, comme on dit, cela fait partie de la règle du jeu, et je pense qu'elle en avait pris toute la mesure : la relation d'estime réciproque qui se construit aujourd'hui entre nous, maintenant que je suis revenue 2 jours par semaine, et qu'elle assume les 2 autres jours, est là pour en témoigner.
Pendant plus d'un an, j'ai cependant vécu, in vivo, ma disparition, mon effacement.
On a beau savoir que nul n'est irremplaçable, c'est douloureux, d'autant plus qu'il ne s'agissait pas d'un départ volontaire, ni même d'un vrai départ, juste une parenthèse ouverte et d'autant plus inconfortable que je ne savais pas quand ni comment elle se refermerait.

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